Margot Bruyère

Voir les autres chroniques de l'année 2006.

Chroniques du lundi

(Publiée le 01 février 2006 par Margot Bruyère)

Reconnaissance

J'ai fait un héritage infiniment précieux: tout un carton de vieux bouquins qui pour la plupart ont perdu leur couverture, dont les cahiers ne tiennent plus ensemble et qui sont piqués de rouille. Un bouquiniste n'en offrirait pas chipette, mais ils ont pour moi une très grande valeur: c'est toute l'œuvre de Balzac.
Je relisais récemment les "Contes drôlatiques" et je suis restée en arrêt sur une phrase de l'usurier Gobsek. À un jeune avoué à qui il avait prêté une forte somme à un taux exorbitant quelques années plus tôt, et qui lui demandait quel sentiment l'avait poussé à lui faire payer de si énormes intérêts et par quelle raison, voulant l'obliger, lui son ami, il ne s'était pas permis un bienfait complet, Gobsek répondit:
— Mon fils, je t'ai dispensé de la reconnaissance en te donnant le droit de croire que tu ne me devais rien.
Il savait bien, le vieux Gobsek, que la reconnaissance, sans amour, est lourde à porter.


Retour Commentaire
 Reconnaissance (Margot Bruyère, 01-02-2006)